Le Petit Analyste vous présente aujourd’hui le métier d’Executive Search. Excellente lecture !
Bonjour et merci d’avoir accepté l’interview ! Quel est ton parcours ?
Après le baccalauréat, j’ai intégré une licence en économie et gestion à l’Université Panthéon-Assas avant de rejoindre le Magistère Banque–Finance en troisième année. Après une première année au sein du Magistère, j’ai préféré intégrer le Master de Finance de Dauphine, puis j’ai été admise au MSc Finance de l’ESCP.
Je me suis rapidement orientée vers la banque d’affaires, le principal débouché de cette formation. J’ai réalisé la première partie de ma césure en M&A chez BNP Paribas, avant de rejoindre Sparring Capital, un fonds de Private Equity parisien. Mon stage de fin d’études s’est déroulé chez Lazard, au sein de l’équipe généraliste. Ce fut une expérience particulièrement enrichissante : j’ai travaillé aussi bien sur des transactions M&A que sur des opérations Equity ou Dette. J’ai également été exposée à de nombreux secteurs tels que l’industrie, les technologies ou encore les matériaux de construction.
Une fois diplômée, j’ai commencé ma carrière chez Rothschild, toujours en M&A. Après un peu plus de deux ans en tant qu’Analyste, j’ai rejoint le cabinet de recrutement Segalen & Associés au niveau Associate.
Du M&A à l’Executive Search
Pourquoi as-tu décidé de travailler en Executive Search ?
J’ai beaucoup aimé mon expérience en M&A, mais mes aspirations ont évolué au fil du temps. Je ne me projetais pas dans les rôles plus seniors. Je trouvais la hiérarchie lourde, ce qui limitait fortement l’exposition au niveau junior et réduisait la valeur ajoutée des Analystes. Cela n’avait plus réellement de sens pour moi.
J’ai donc fait le point sur ce que je souhaitais retrouver dans mon prochain métier. Je voulais davantage d’autonomie et une dimension humaine plus forte. C’est ainsi que je me suis tournée vers l’Executive Search.
Comment t’es-tu préparée à ce changement de carrière ?
J’ai d’abord identifié les plus grands cabinets d’Executive Search, surnommés les SHREK : Spencer Stuart, Heidrick & Struggles, Russell Reynolds Associates, Egon Zehnder et Korn Ferry. J’ai rencontré différents consultants de chacun de ces cabinets pour comprendre leurs méthodes, leur fonctionnement et leur culture. Je voulais aussi savoir quelle place occupait la spécialité Financial Services au sein de ces institutions, car mon objectif était de me spécialiser dans ce domaine en m’appuyant sur mon expérience en banque d’affaires.
Comment as-tu concilié le rythme en M&A et ta reconversion ?
J’ai quitté Rothschild avant d’entamer ma reconversion. Il est difficile de réfléchir à son avenir lorsque l’on travaille entre quatre-vingts et cent heures par semaine. Prendre du recul m’a permis de structurer mon projet.
Je vois beaucoup de juniors n’osant pas s’engager dans des processus de recrutement par manque de temps. Ils ne peuvent ni passer d’entretien ni réfléchir sereinement à leur avenir.
En partant, j’ai eu un moment de respiration. J’ai pu poser les choses : ce que je voulais garder, ce que je voulais changer, quel type d’environnement me correspondait. Ce temps était nécessaire pour prendre une décision lucide, calme, alignée — sans la pression du quotidien bancaire.
Comment as-tu négocié la rémunération ?
Il n’y a pas eu de négociation à proprement parler. J’avais en tête un salaire plancher, aligné avec le marché. Je connaissais les niveaux de rémunération proposés par les grands cabinets, et eux-mêmes sont au fait des pratiques du secteur, ce qui a facilité les discussions.
Est-il courant de passer du M&A à l’Executive Search ? Que sont devenus les Analystes de ta promotion ?
Non, il est assez rare de passer du M&A à l’Executive Search, surtout à ce niveau de séniorité. Pourtant, c’est un parcours tout à fait cohérent — la difficulté vient surtout du manque d’informations sur cette voie.
La plupart des Analystes de ma promotion chez Rothschild ne sont plus en poste. Certains sont partis dans d’autres banques ou en conseil en stratégie. Contrairement à une idée reçue, le Private Equity n’est plus le débouché systématique. Beaucoup d’anciens Analystes recherchent davantage de sens dans leur travail et un meilleur équilibre de vie. Certains rejoignent une start-up en tant que Directeur Financier ou Chief of Staff, par exemple.
L’Executive Search au quotidien
À quoi ressemble ton quotidien ?
Nous pouvons pitcher ou être directement sollicités par un client, ce qui nous permet d’éviter la concurrence d’autres cabinets. Lorsque nous pitchons, nous venons avec deux ou trois candidats en tête, puis nous affinons la compréhension des besoins du client.
Une fois le mandat remporté, nous analysons le marché, approchons les professionnels pertinents, menons les entretiens, recueillons les retours des candidats et réalisons des prises de références. Parallèlement, nous tenons le client informé de l’avancée du processus lors de calls hebdomadaires. Nous présentons peu de candidats, mais des profils de grande qualité. C’est l’approche que nous privilégions chez Segalen & Associés.
En général, une mission dure moins de trois mois, même si cela varie selon les structures. Les grands fonds américains, par exemple, doivent souvent obtenir la validation du siège à New York, ce qui rallonge les délais.
Pour quels types de clients travailles-tu ?
Segalen+Associés travaille exclusivement sur des postes seniors : des recrutements qui structurent vraiment une organisation.
Nos clients:
- fonds d’investissement,
- participations,
- familles et family offices.
Les rôles : investisseurs seniors, operating partners, CFO, COO, advisors, sales institutionnels, etc.
De par mon expérience passée en M&A, je travaille naturellement davantage sur des mandats financiers. Je connais leurs environnements, leurs rythmes, les dynamiques d’équipe — ce qui facilite l’analyse et la compréhension des parcours.
Les grands cabinets SHREK sont eux organisés par secteur, comme les banques d’affaires. Il existe également à Paris de nombreux cabinets spécialisés par industrie : immobilier, juridique, technologies, etc.
Comment se rémunère un cabinet de recrutement ?
Les cabinets se rémunèrent sur un pourcentage — autour de 30 % — de la rémunération totale du candidat lors de sa première année.
As-tu des conseils à donner aux personnes passant un entretien ?
Le plus important est de montrer que vos valeurs correspondent à la culture de l’entreprise. Il faut également démontrer une motivation réelle : un salaire plus élevé ne suffit pas.
Lorsque je contacte un candidat, je lui demande ce qui lui manque dans son poste actuel et ce qui pourrait le motiver à changer de structure avant même de lui présenter les opportunités.
Gardez aussi à l’esprit que plus vous changez d’entreprise, moins vous serez désirable : certains recruteurs peuvent percevoir cela comme un manque de loyauté.
Constates-tu un changement de tendance dans le secteur de la finance ?
Le marché est assez tendu : beaucoup de très bons candidats, mais des équipes qui ont atteint leur maturité dans plusieurs fonds.
On observe plusieurs tendances :
- importance grandissante du fit culturel,
- recherche de profils hybrides (finance + opérationnel + leadership),
- besoins forts sur les rôles clés : CFO en LBO, operating partners, investisseurs expérimentés,
- montée en puissance des family offices et entreprises familiales.
Qu’aimes-tu au quotidien dans ton métier ?
Aucun jour ne se ressemble : chaque mandat est différent. La dimension humaine est centrale — nous échangeons en moyenne avec une trentaine de personnes par mission. Je découvre constamment de nouvelles personnalités et j’apprends à repérer qui correspond vraiment au poste. Le métier apporte également une valeur ajoutée importante au client, car un bon recrutement peut changer l’avenir d’une entreprise.
Merci !
