Tout ce qu'il faut savoir sur l'export finance : acteurs, quotidien, rythme, entretiens, salaires ...
Tout ce qu'il faut savoir sur l'export finance : acteurs, quotidien, rythme, entretiens, salaires ...

Le Petit Analyste vous présente aujourd’hui l’Export Finance, avec l’interview d’un Vice President, d’un Associate et d’un stagiaire ! Bonne lecture !

Bonjour et merci d’avoir accepté l’interview ! Quels sont vos parcours ?

Vice President : Après une classe préparatoire ECS, j’ai intégré une école de commerce où j’ai effectué une année de césure en Export Finance, suivie d’une alternance en Project Finance. Diplôme en poche, je suis parti deux ans au Brésil dans le cadre d’un VIE. Je travaille aujourd’hui à Paris, au sein d’une équipe spécialisée en Export Finance.

Associate : Comme mon collègue, j’ai débuté par une classe préparatoire ECS, avant de m’orienter vers une licence en mathématiques appliquées aux sciences sociales. J’ai ensuite intégré une école de commerce via les admissions parallèles, avec une spécialisation en finance. Ma césure s’est partagée entre l’Export Finance et l’Equity Research. À la fin de mon cursus, j’ai commencé en Export Finance à Francfort en VIE, avant d’intégrer une équipe d’Export Finance à Paris.

Stagiaire : Après le baccalauréat, j’ai suivi une classe préparatoire ECS, puis intégré une école de commerce. Mon premier stage s’est déroulé en Coverage au sein d’une banque française. Je poursuis actuellement mon parcours par un stage en Export Finance.

Présentation de l’Export Finance

En quoi consiste l’Export Finance ?

Vice President : L’Export Finance consiste à accorder des financements à un importateur (des entreprises ou des États) qui acquière des biens ou services exportés depuis un autre pays — en l’occurrence, la France, pays exportateur. Nous intervenons souvent dans le cadre de projets situés dans des pays considérés comme non investment grade, c’est-à-dire jugés trop risqués pour bénéficier d’un financement bancaire classique à long terme.

Cette activité est encadrée par un ensemble de règles internationales appelées le consensus OCDE, qui régit un certain nombre de règles, notamment la durée maximale des financements, le montant pouvant être couvert, ou encore les conditions de tarification de l’assurance.

L’un des atouts majeurs du produit Export Finance réside dans le soutien des agences de crédit export, comme Bpifrance Assurance Export pour la France. Grâce à cette garantie publique, les entreprises françaises peuvent développer leurs activités à l’international, notamment dans les pays émergents. On observe d’ailleurs une tendance croissante à recourir à ces financements également pour des projets situés dans des pays développés.

Les bénéficiaires peuvent être de toute taille : PME, ETI ou grands groupes internationaux. Cela dit, les grandes banques privilégient généralement les opérations d’envergure, car les plus petits projets, bien que souvent intéressants, mobilisent des ressources similaires pour une rentabilité moindre. En pratique, le montant moyen des opérations s’établit autour de 200-500 millions d’euros, avec certains projets pouvant dépasser plusieurs milliards.

Quelles sont les différences entre l’Export Finance et le Project Finance ?

Vice President : Ce qui distingue l’Export Finance du Project Finance, c’est le fondement même de l’analyse du risque. En Export Finance, le financement ne repose pas sur les flux de trésorerie générés par le projet lui-même, contrairement au Project Finance. Nous nous appuyons plutôt sur la solidité financière de l’acheteur/emprunteur dans son ensemble, ainsi que sur la notation du pays de destination. Cela nous permet parfois de financer des projets qui, en eux-mêmes, ne produisent pas de cash flows.

Quels sont les grands acteurs du secteur ?

Associate : L’écosystème de l’Export Finance réunit plusieurs types d’acteurs. Du côté des entreprises exportatrices, la France peut s’enorgueillir de compter de grands noms de l’industrie, et ce dans différents secteurs, de l’aéronautique, shipping, construction, énergie ou transports.

Côté bancaire, les principales institutions actives sur le marché français dans ce domaine sont les grandes banques françaises  tel que BNP Paribas, Crédit Agricole CIB, Natixis ou Société Générale. On retrouve également différentes banques européennes et dans une moindre mesure certaines banques anglo-saxonnes, principalement basées à Londres.

Nous collaborons étroitement avec Bpifrance Assurance Export, en lien direct avec la Direction générale du Trésor. Chaque opération bénéficiant de la couverture de Bpifrance doit être validée par un comité interministériel, garantissant l’alignement avec les objectifs stratégiques de l’État français.

Enfin, les cabinets d’avocats — qu’ils soient français ou anglo-saxons — jouent un rôle essentiel en accompagnant les transactions sur les volets juridiques et de structuration.

Quels types de produits proposez-vous ?

Vice President : Le produit le plus courant en Export Finance est le crédit acheteur, ou buyer credit. Dans ce schéma, la banque prête directement à l’acheteur/importateur situé à l’étranger afin qu’il puisse régler le contrat signé avec l’entreprise française exportatrice. Ce financement est généralement couvert par Bpifrance Assurance Export. Il s’agit d’une structure classique et largement utilisée.

Cependant, comme mentionné précédemment, le crédit acheteur est encadré par le consensus OCDE, ce qui impose certaines contraintes. Or, il arrive que les besoins de financement des entreprises ou États dépassent ce cadre réglementaire. Pour répondre à ces situations, certaines agences de crédit export proposent des produits dits déliés (untied), qui ne sont pas soumis aux règles de l’OCDE. Chaque agence de crédit export développe ainsi ses propres instruments.

En France, Bpifrance propose par exemple la Garantie des Projets Stratégiques (GPS). Ce dispositif permet de garantir des projets qui, bien que ne relevant pas strictement de l’exportation, présentent un intérêt stratégique pour l’économie française. Il peut s’agir, par exemple, de projets liés à l’exploitation de matières premières stratégiques ou à la production de batteries électriques.

Travailler en Export Finance

Quelles expériences sont valorisées pour entrer dans ce milieu ?

Associate : La voie d’entrée la plus courante en Export Finance dans une banque française passe souvent par un VIE. C’est généralement une première expérience très formatrice. Si la mission est concluante, un poste peut être proposé par la suite à Paris, soit directement en Export Finance, soit dans d’autres équipes au sein de la banque en fonction des besoins et opportunités.

Stagiaire : Il est assez difficile d’obtenir un premier stage directement en Export Finance. Il est souvent plus stratégique de débuter par un stage en audit, en Coverage ou dans un autre département bancaire pour acquérir une première expérience plus généraliste.

Associate : C’est vrai, les opportunités sont limitées, même si ce n’est pas impossible. Pour ma part, j’ai eu la chance d’effectuer la première partie de ma césure en Export Finance, ce qui m’a permis de mieux comprendre le métier dès le départ.

Comment préparer au mieux les entretiens ?

Associate : Un véritable intérêt pour les enjeux géopolitiques est essentiel pour s’épanouir en Export Finance. Il est également important de maîtriser les bases du schéma classique de financement export. Pour approfondir ces notions, je recommande de consulter l’article dédié à l’Export Finance sur le site d’Alumneye, du Petit Analyste ainsi que les plateformes des agences de crédit export et des banques actives en financement export. Le site TXF constitue également une excellente ressource : il est la référence dans  le secteur et couvre les tendances du marché, les dernières transactions et les évolutions réglementaires.

Vice President : Avoir des notions en Project Finance peut également être un atout. Les deux métiers sont proches, et certaines compétences sont transversales, notamment en matière d’analyse financière et de structuration. Ces connaissances seront certainement valorisées dans un parcours en Export Finance.

À quelle fourchette de salaire peut prétendre un jeune diplômé ?

Associate : Un jeune diplômé débutant comme Analyste peut s’attendre à une rémunération d’environ 50 000 euros annuels bruts. Le bonus est généralement discrétionnaire et varie en fonction des établissements et de la performance individuelle ou collective.

Le quotidien en Export Finance

Pouvez-vous vous nous parler des grandes étapes d’une transaction ?

Vice President : Le processus débute généralement par l’origination de la transaction. Le client peut venir vers nous avec une demande précise, mais il arrive aussi que les équipes d’Export Finance prennent l’initiative de proposer des solutions de financement à des entreprises exportatrices.

Une fois le projet identifié, les discussions avec Bpifrance sont entamées pour évaluer la faisabilité de la structure envisagée. Parallèlement, les banques commerciales réalisent une analyse de la profitabilité de l’opération, étape indispensable avant de soumettre le dossier aux différents comités internes de la banque afin d’obtenir une offre ferme et engageante.

Il faut noter que le taux de conversion des opportunités reste relativement faible. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cela : abandon du projet par le client, offre plus compétitive proposée par un concurrent ou encore refus en comité.

Lorsque toutes les parties sont alignées, nous passons à la structuration. Cette étape mobilise nos juristes internes ainsi que des cabinets d’avocats externes, afin de formaliser l’ensemble des conditions négociées. Une fois les contrats signés, les fonds sont décaissés et nous assurons ensuite un suivi régulier du projet pendant sa mise en œuvre.

Stagiaire : Les projets les plus rapides s’étalent sur environ six mois, entre l’origination et la signature finale, tandis que d’autres peuvent prendre un an ou davantage, selon leur complexité.

A quoi ressemble le quotidien d’un banquier en Export Finance ?

Vice President : Les profils juniors se concentrent principalement sur les missions internes, telles que le calcul de la profitabilité et la préparation des comités internes. Avec l’expérience, ils sont progressivement impliqués dans les phases plus exposées de l’origination et de la structuration des transactions.

Ces étapes sont particulièrement complexes : l’origination demande une certaine aisance relationnelle pour échanger avec les clients, tandis que la structuration requiert une compréhension approfondie du produit et de ses spécificités. Ces compétences se développent naturellement avec le temps et la pratique.

Associate : En fonction de la taille de l’équipe, les profils juniors peuvent être amenés à participer à toutes les étapes du processus de transaction, ce qui favorise un apprentissage rapide et complet.

Les événements économiques et politiques impactent-ils votre activité ?

Vice President : Les projets financés en Export Finance s’étalent généralement sur plusieurs mois, voire plusieurs années. Ils ne sont donc pas directement affectés par les fluctuations politiques ou économiques à court terme. Bien sûr, certaines annonces peuvent entraîner des retards de plusieurs mois, mais cela reste marginal face à la durée globale des projets. Par exemple, les mesures annoncées par l’administration Trump concernant l’instauration de droits de douane n’ont eu aucune incidence notable sur nos dossiers en cours.

En revanche, les tendances géopolitiques à long terme influencent significativement notre activité. Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, nous observons un renforcement de l’industrie de défense en Europe, ce qui se traduit par un nombre croissant de dossiers liés à ce secteur qui arrivent sur nos bureaux.

Quels sont les outils utilisés ?

Stagiaire : En tant que stagiaire, une partie du travail consiste à effectuer des recherches approfondies et à préparer des présentations sous PowerPoint. Nous utilisons également Excel pour réaliser les calculs de profitabilité, ainsi que Word pour rédiger les dossiers destinés aux comités internes.

Quid du rythme en Export Finance ?

Vice President : Les journées débutent généralement entre 9h et 9h30 et s’achèvent en moyenne vers 20h, rarement avant 19h. Il est également très rare de travailler le week-end.

L’après Export Finance

Quels sont les débouchés après quelques années en Export Finance ?

Associate : Certaines personnes choisissent de faire toute leur carrière en Export Finance, un domaine qui offre une exposition enrichissante à des sujets variés comme l’économie, la géopolitique et la finance, tout en permettant de préserver un bon équilibre de vie.

Il est aussi fréquent d’évoluer vers d’autres équipes au sein de la banque, telles que le Project Finance, le Coverage, le Shipping Finance ou encore l’Aviation Finance. Après plusieurs années d’expérience, certains professionnels choisissent de rejoindre un client ou une agence de crédit export, poursuivant ainsi leur parcours dans un environnement différent mais complémentaire.

Qu’aimez-vous dans votre métier ?

Associate : J’apprécie la diversité des projets et la variété des interlocuteurs. Ce que j’aime particulièrement, c’est de savoir que mon travail a un impact concret sur l’économie nationale et sur les entreprises françaises que nous accompagnons.

Vice President : Ce que j’aime, c’est d’être au cœur de l’actualité économique et géopolitique. Nous devons toujours avoir un coup d’avance en identifiant les grandes tendances afin de proposer des solutions adaptées à nos clients. J’apprécie aussi énormément de travailler avec des équipes internationales, réparties aux quatre coins du monde.

Merci à vous !

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