Après le co-investissement et l’Infrastructure Private Equity, direction le Real Estate Private Equity. Excellente lecture !
Bonjour et merci d’avoir accepté l’interview ! Quel est ton parcours ?
J’ai trouvé mon premier stage en école de commerce dans le secteur de l’immobilier. J’ai ensuite eu une offre de stage dans une équipe M&A Real Estate. Même si je ne souhaitais pas initialement me spécialiser en Real Estate, j’ai quand même accepté la proposition de stage. L’équipe était sympathique et cela me permettait de valoriser ce que j’ai appris lors de mon premier stage.
Même si à l’époque mon profil pouvait faire peur à des banques cherchant des candidats généralistes, mon CV se démarquait nettement lorsque je postulais dans des équipes Real Estate. Les candidats avec une spécialité en immobilier ne sont pas très nombreux. En plus de ça, c’est un secteur qui n’attire pas forcément beaucoup d’étudiants.
J’ai ensuite effectué des stages à Londres en M&A et en Private Equity, toujours en immobilier. J’ai ensuite travaillé en tant qu’Analyste dans l’équipe Real Estate d’une banque anglo-saxonne avant d’entrer dans un fonds de Real Estate Private Equity.
Présentation du Real Estate Private Equity
En quoi consiste le Real Estate Private Equity ?
Types de deals
La grosse différence avec le Private Equity classique réside dans les types de cibles. En immobilier, nous pouvons soit :
- Acheter l’actif, comme des bureaux. C’est ce qu’on appelle un asset deal ;
- Acheter l’entreprise, comme une foncière. C’est un corporate deal.
Il faut d’ailleurs savoir que les foncières ne sont simplement que des holdings détenant des actifs. C’est assez spécial car ils n’ont pas d’opérations à proprement parler. En caricaturant, c’est simplement 4 murs et un toit. La gestion d’une foncière est donc différente d’une acquisition classique réalisée par un fonds de Private Equity traditionnel.
Nous investissons aussi dans des projets greenfield, c’est à dire des nouveaux projets que nous allons développer.
Différences de profil
Les profils évoluant en Real Estate Private Equity sont également différents du Private Equity classique. Nous retrouvons bien sûr des anciens banquiers mais également des personnes issues d’entreprises immobilières, comme Unibail ou Klépierre. Ces derniers travaillaient souvent dans les équipes d’acquisition.
Quels sont les grands acteurs ?
Blackstone est le plus grand acteur du secteur, et de loin. Leur portefeuille en Real Estate s’élève à trois cent quarante et un milliards de dollars. Blackstone est d’ailleurs connu à l’origine pour son activité en immobilier et non en Private Equity classique, même s’ils sont très bons dedans. Les autres grands acteurs sont Lone Star, Brookfield, Starwood Capital Group ou encore Colony Capital.
Tous les gros fonds de Private Equity ont une équipe dédiée à l’immobilier : TPG, KKR, Apollo, Carlyle… Il faut toutefois faire attention à la réputation des équipes. Au sein d’un même fonds, une équipe Real Estate Private Equity ne jouera pas forcément du même prestige que son homologue en Private Equity.
Dans quels types d’actifs investissez-vous ?
Les actifs les plus connus sont bien sûr les bureaux et les centres commerciaux. Nous pouvons également investir dans des entrepôts, de l’immobilier résidentiel, des data centers, des studios de cinémas, des cliniques ou encore des maisons de retraite. Contrairement à ce que l’on peut penser, les actifs sont variés.
Nous ne travaillons pas sur les actifs liés à des concessions ou opérant sous un monopole d’Etat. Ce sont les équipes d’Infrastructure Private Equity qui s’en occupent.
Travailler en Real Estate Private Equity
Quelles expériences et qualités sont recherchées pour un stage ou une première expérience dans ce milieu ?
Le profil des candidats
Je trouve que le monde de l’immobilier est énorme comparé à celui du Private Equity classique. Cela ne recrute toutefois que des personnes avec une expérience dans le milieu et les équipes sont beaucoup plus petites. Tu n’es donc pas en compétition avec des centaines de candidats lorsque tu postules dans un fonds immobilier. A l’inverse, un fonds généraliste va aussi bien recevoir en entretien des banquiers venant des équipes TMT que Retail ou Industrial. Le nombre de candidats est donc beaucoup plus important.
Choix de secteur et débouchés
Une fois en M&A, tu es très souvent obligé de choisir un secteur. C’est assez complexe et stressant car il y a un monde entre ce que l’on aimerait avoir et les choix possibles. En général, les futurs banquiers privilégient certains secteurs comme TMT. Une des raisons à cela est les opportunités de sorties. Si on choisit de travailler en banque d’affaires dans une équipe TMT, les débouchés sont variés : entreprise de télécommunication comme Orange ou Vodafone, des développeurs de software, des start-ups ou encore des entreprises d’e-commerce. Les opportunités en sortant d’une équipe Oil & Gas à Paris seront en revanche moins nombreuses. Il n’y pas des centaines d’énergéticiens dans l’Hexagone.
A l’inverse, l’immobilier est composé de très nombreux acteurs locaux. Parler la langue est également un atout. En tant que française à Londres, je suis impliqué dans toutes les transactions françaises car j’ai une véritable valeur ajoutée.
Quelles sont les notions à connaître pour un entretien ?
Connaissances
Tout dépend de ton parcours. Si tu as déjà une expérience dans le secteur, tu devras être à l’aise avec certaines notions comme le taux de capitalisation ou la NAV, c’est à dire la Net Asset Value.
Pourquoi l’immobilier ?
On va aussi te demander les raisons qui t’ont poussé à choisir le secteur de l’immobilier. Evitez à tout prix de répondre que les actifs sont tangibles. C’est un argument assez pauvre. Il y a de bien meilleures raisons pour rentrer en immobilier.
Le Real Estate est un secteur sous-jacent à de nombreux autres secteurs : data center, logistique, cinéma, commerce traditionnel et en ligne, santé … Tu es obligé de comprendre le fonctionnement de ces secteurs et anticiper leurs tendances tout en gardant à l’esprit les spécificités de l’immobilier. Le secteur est donc plus complexe que ce peut penser la plupart des personnes.
Le quotidien
Quelles sont les grandes étapes d’un deal ?
Ce sont les mêmes étapes qu’en Private Equity classique. Nos Due Diligences seront toutefois plus proches de l’actif, avec des aspects techniques.
A quoi ressemble le quotidien en Real Estate Private Equity ?
Cela dépend du fonds dans lequel tu travailles. Là où je suis, nous sommes deux par transaction. L’exposition est donc énorme. Je dois gérer quotidiennement les deals en cours : relation avec les conseillers financiers ou juridiques, gestion de l’administratif, modélisation financière ou encore négociation de la documentation juridique.
Je peux également originer mes propres transactions. L’origination est d’ailleurs assez différente du Private Equity classique. Tu peux trouver un bien immobilier ou un propriétaire en vérifiant simplement les permis de construire ou en regardant le cadastre. C’est beaucoup plus intéressant que de simplement lire les Information Memorandum envoyés par les banquiers aux différents fonds de la City.
La possibilité d’originer ou non les transactions dépend toutefois beaucoup de l’organisation du fonds. Certains sont très hiérarchiques et ne te laisseront pas le faire avant de nombreuses années.
Quid des horaires ?
Cela dépend bien sûr du fonds même si généralement, le rythme est moins soutenu qu’en Private Equity classique. Là où je suis, je commence vers neuf heures et finis vers vingt et une heure ou vingt deux heure, avec du travail ponctuellement le week-end. C’est le rythme de croisière.
Avec la pandémie actuelle, quelles sont les tendances dans le secteur de l’immobilier ?
Tout dépend de l’actif. Les entrepôts ont profité de la crise grâce au commerce en ligne alors que les centres commerciaux ont été frappé de plein fouet par la pandémie. Avant la crise actuelle, l’immobilier de commerce était valorisé très haut et on s’attendait un jour ou l’autre à une correction. La COVID-19 a accéléré les choses.
L’impact du télétravail sur l’immobilier est toutefois plus dur à estimer sur le long terme. Il n’y a pas vraiment de consensus.
L’après Real Estate Private Equity
Quels sont les débouchés ?
Il y a pas mal de débouchés. Il y a beaucoup de métiers et d’entreprises différentes dans le monde de l’immobilier : gestionnaires d’actifs, sociétés foncière, family offices, brokers … Si tu veux partir du monde du Private Equity et de la finance, tu peux aussi rejoindre un département immobilier d’une entreprise. La plupart des grandes entreprises en ont un, comme Peugeot ou Total.
Est-il possible de rejoindre un fonds de Private Equity classique ?
C’est compliqué, même s’il faut nuancer. C’est envisageable si tu es dans un grand fonds et que tu es exposé à beaucoup de corporate deals. A l’inverse, cela va être compliqué si tu as principalement travaillé sur des asset deals car les analyses sont différentes.
Une autre stratégie serait de passer dans un fonds de Private Equity moins réputé que celui dans lequel tu travailles actuellement. Passer d’un grand fonds de Real Estate Private Equity, comme TPG ou Lone Star, à un petit fonds de Private Equity me paraît là aussi envisageable. A l’inverse, rester dans un fonds de même réputation me paraît extrêmement compliqué.
L’inverse est d’ailleurs vrai. Il est très dur de rejoindre un fonds de Real Estate Private Equity après quelques temps dans un fonds généraliste.
Qu’aimes-tu dans ton métier ?
C’est un secteur dense, profond, très terre à terre, avec une variété de situations et d’actifs. Tu es obligé de comprendre les autres secteurs si tu veux être bon en immobilier. Les interlocuteurs sont nombreux, on ne sait jamais qui peut nous apporter le prochain deal. C’est vraiment un métier de relations. C’est la clé de la réussite.
2 Comments
[…] Le Real Estate Private Equity […]
Quid des salaires ?